Notice de Sœur JAUBERT
18 Août 1903- 9 Juin 1960
57 ans- 35 de vocation
Maison de la Vierge Puissante- ISPAHAN – IRAN
Entrée en Communauté à 22 ans, après dix ails passés à Chambéry, les Supérieurs la désignent pour la dure mission de Perse où elle besognera vingt-cinq ans, neuf ans comme compagne à Téhéran, puis seize ails comme Sœur Servante à Ispahan.
Quelques mots sur la Perse pour situer son apostolat! La géographie montre un pays montagneux grand comme trois fois la France s'étendant entre deux mers : la Caspienne au Nord, le golfe Persique et la mer d'Oman au Sud. Voisin de l'U.R.S.S. au Nord, cet Etat a sur ses frontières : la Turquie et l'Irak à l'Ouest, le Turquestan au Nord-Est; l'Afganistan et le Belouchistan à l'Est.
Entre deux mille et quatre mille mètres - le Demavend qui domine Téhéran a davantage encore presque six mille! - de hautes montagnes enserrent un plateau central et un désert salé ...
« L'Iran est par excellence le pays des contrastes, s'écrit M. Le Cunuder, Visiteur Missionnaire Lazariste.
Son sol est étrange et tourmenté, aux trois quarts aride et dénudé, formé ou plutôt déformé par d'abruptes montagnes, à l'aspect chaotique dont les flancs bouleversés renferment, dit-on, des merveilles de richesses inexploitées. Retiré sur des centaines de kilomètres par de larges bandes de plateaux couverts de sables rocailleux où il n'ya ni végétation, ni rivières, il présente ça et là, dans le creux des vallées, près des sources aux eaux claires et limpides ou le long des ruisseaux serpentant au fond des ravins, de magnifiques oasis de verdure, parsemées de champs de blé, de seigle et d'avoine, de prairies grasses et fertiles. « Pays de contrastes, l'Iran l'est non seulement par son sol mais aussi par son ciel, presque éternellement d'un bleu turquoise qu'aucun nuage ne trouble pendant de longs mois. Une rare limpidité d'atmosphère rapproche démesurément les horizons et éclaire les moindres détails d'une lumière intense. Les nuits silencieuses où les astres brillent d'un éclat inaccoutumé invitent à la méditation et à la rêverie! Partout une variation subite, une chute anormale de température entre le jour et la nuit ...
L'Université de Téhéran a ses Facultés de Droit, de Médecine, de Lettres, Ecole des Beaux Arts et Ecole Normale Supérieure, etc., sans oublier une Cité Universitaire très bien aménagée. Parcourir le "babillard" du collège Jeanne d'Arc situe ses anciennes élèves aux quatre coins du monde d'Europe et d'Amérique. Mais l'instruction primaire, obligatoire en principe, ne peut encore être une réalité, faute d'écoles. Les filles de plus en plus pourtant désirent étudier comme leurs frères.
Elle occupe une place importante dans la vie des Iraniens, mais sur 19 millions d'habitants, on compte 18.500.000 musulmans chiites, 140.000 orientaux, 80.000 israélites et seulement 17.000 catholiques, avec 50 prêtres et 59 religieuses, en majorité Filles de la Charité ! On estime que 40 des Iraniens ont moins de quinze ans…Et la petite Compagnie?
Il vaudrait mieux dire "la double famille" ... C'est M. Eugène Boré, encore laïc et savant orientaliste qui décida les Lazaristes à accepter la dure mission de Perse où ils s'établirent en 1840. Toute leur activité se cantonna dans le Nord, autour du lac d'Ourmiah où les chrétiens chaldéens étaient nombreux.
Les Filles de la Charité arrivèrent en 1856 à Kosrowa, puis à Ourmiah en 1857. La guerre de 1914 ruina les œuvres qui avaient essaimé (Téhéran 1875, Tauris 1904, Djoulfa, Ispahan 1904). L'après guerre permit le relèvement, mérité par le sang des martyrs Lazaristes de 1918 sur le sol persan: Mgr Sontag, Délégué Apostolique et ses confrères ...
Mais ce n'est pas à Téhéran que Sœur Jaubert demeura le plus de temps. En 1944, les Supérieurs lui confièrent, à 400 kilomètres de là, la charge de la Maison d'Ispahan, où elle remplaça la très aimée et regrettée Sœur Barada.
Ispahan, la ville des rêves et des roses ! Ispahan, l'incomparable cité reposant dans un fond de verdure, "comme un bijou dans son écrin"! Ispahan, ancienne capitale du roi des Perses, avait été au XVI" siècle, la ville la plus importante du monde avec près d'un million d'habitants, 160 mosquées, 48 collèges, 1.800 caravansérails et 273 bains publics.
Mais Ispahan d'aujourd'hui? Si la cité s'élève toujours à plus de 1400 mètres d'altitude, elle n'a plus que deux cent mille habitants et présente son contraste de ville très rapidement modernisée tout en étant farouchement attachée aux vestiges de gloire du passé.,; Innombrables mosquées aux dômes bleus ou dorés étincelants au soleil, minarets recouverts de "cachis" (faïences) bleu-verts inaltérables, oui! Musées nombreux et splendides palais, oui encore! Mais ville aussi de casernes et d'usines : près de vingt mille ouvriers travaillent en d'immenses ateliers aux tissages des étoffes et des cotonnades, au milieu du vacarme étourdissant des machines.
Cinq Sœurs seulement à son arrivée: une française, une arménienne, deux polonaises. Cinquante élèves externes fréquentent les trois classes, neuf fillettes chrétiennes sont élevées à l'orphelinat; les pauvres viennent nombreux au dispensaire et la Sœur essaie de commencer la visite à domicile... Toutes petites œuvres que chacune remplit avec beaucoup d'amour ...
A certaines heures, l'isolement pèse lourdement à la nouvelle Sœur Servante ! La croix de la responsabilité s l'effraie et elle ne craint pas de le dire en toute simplicité et humilité:
Mais, à la mort de Sœur Jaubert, l'école, de 50 enfants est passée à 140 plus les 75 pensionnaires et les 25 orphelines; un jardin d'enfants très beau on vient le visiter de toute la ville, accueille les tout-petits; au dispensaire, l'hiver, plus d'une centaine de pauvres se font soigner et 120 bébés fréquentent la consultation de nourrissons régulièrement! La Maison est presque totalement renouvelée.
Près de là Sainte Vierge, Sœur Jaubert peut chanter le Magnificat: «Le Seigneur a regardé la bassesse de sa Servante, une bassesse aimée, reconnue, celle qui attire les complaisances du Tout-Puissant, et substitue Sa force à la faiblesse native."